Charlotte

« Après le mot maman, le plus beau mot du monde est artiste. »
Charlotte a bientôt 20 ans. Ses parents sont allemands, mais elle a vécu en Espagne où elle a étudié dans un lycée français. Après un bac option arts plastiques, elle s’est dirigée vers la licence de sociologie et communication à Lyon II. Aujourd'hui, elle est en deuxième année de licence, et je la rencontre pour la première fois.
« J'aime laisser une petite trace éphémère ».
Elle commence par me faire visiter son appartement, puisque ses créations sont disséminées dans toutes les pièces, jusqu'aux toilettes, sur les murs, les portes, le plafond et même les fenêtres.
Charlotte m'explique que ses créations ont trois destins possibles : décorer l'appartement, être données, ou bien jetées. Elle insiste sur cette notion d'éphémère : elle n'aime pas garder ses créations, elle ne sait pas quoi en faire, et l'idée que ses dessins finissent enfermés dans son carnet ne lui plaît pas. La notion de partage est très importante pour Charlotte, elle qui propose toujours ses dessins à ses amis, qui restent libres de les accepter ou non. Elle aime aussi exposer dans sa maison, rendre ses créations accessibles à tous.
Charlotte a pour seule certitude de vouloir créer toute sa vie. Autodidacte, elle regrette de ne pas avoir un bagage technique suffisant, mais elle est curieuse d'apprendre de nouvelles choses et d'approfondir sa manière de dessiner. Elle dessine depuis toute petite. Dans son enfance, elle s'amusait à recopier les vieilles photos dont personne ne voulait. Elle a toujours eu le soutien de sa famille, qui accrochait ses dessins sur les murs. Récemment, sa mère lui a même avoué avoir rêvé que sa fille soit artiste.
« Pour savoir si ça fait quelque chose... »
La réception de ses créations est très importante pour elle ; elle ressent le besoin de les montrer. A ce sujet, elle me confie un épisode de son enfance qui l'a marquée : à l'école maternelle, alors qu'elle montre à sa maîtresse le dessin d'un bonhomme qu'elle vient de réaliser, cette dernière lui répond : « Oh ! Qu'ils sont beaux tes soleils ! ». Depuis, ce qui l'intrigue, c'est de voir comment les gens lisent l’œuvre, l'interprètent, se l'approprient. Pour elle, le but de l'art est de faire passer un message, de transmettre quelque chose. Pendant un temps, elle crée des petites bandes dessinées qui lui permettent de s'exprimer clairement. Le moment qu'elle aime le moins est celui des débuts, face à là feuille blanche ; elle adore cependant l'instant où tout commence à prendre forme. Et ce qu'elle préfère, c'est offrir son œuvre finie en partage, et pouvoir en discuter.
Ses créations s'enracinent dans sa vie, son histoire, ses émotions, ses sentiments, ses expériences, son existence... Elle aime partir de la réalité, de ce qu'elle voit, pour mieux déformer les choses, en se les appropriant. Charlotte utilise la peinture quand elle est triste, cela lui permet de s'exprimer, mais elle n'a pas de médium préféré : elle prend ce qu'elle a sous la main. Charlotte crée de manière instinctive. Les rapports sexuels et le sexe sont récurrents dans ses dessins, parfois omniprésents, parfois en petites touches ajoutées a posteriori.
Notre étudiante considère que l'art ne se cantonne pas aux musées ; il est présent partout, il suffit simplement de désirer voir, ou qu'une personne nous aide à voir les choses différemment. Du haut de ses vingt ans, Charlotte m'a touchée par sa façon de penser, sa manière de concevoir la création en termes de partage, de liberté et d'éphémère. A travers la variété de ses dessins, j'apprécie sa liberté de style. Je vous laisse découvrir ses « petites bêtises », comme elle les appelle, piochées dans ses carnets et dans son appartement.
Laurie LOUISON
Oeuvre choisie

Quelque mots de :
L'artiste :
« C'est un auto-portrait. Je l'ai réalisé pendant une période de ma vie où je n'allais pas très bien. Je l'ai réalisé un soir, seule, chez moi. J'ai pris un vieux pinceau dur, le revers d'un poster et de la peinture, et je me suis défoulée. Je sortais d'une rupture, et j'essayais d'oublier, d'aller de l'avant. On voit que j'essaye de sortir du noir, pour aller vers le côté lumineux. Mais il n'y a que mon corps qui arrive à s'extirper de cette pénombre, ma tête est encore enfouie dans cette partie sombre, elle se fond dedans. »
La Galerie 0 :
" Le geste est spontané, expressif ; les traits sont durs, on ressent la violence et l'effort. Le support n'est pas entièrement peint, il y a des réserves, une sorte de non fini, qui accentue l'idée d'action en cours et l'impression que le corps se projette vers nous. Mais l'utilisation unique de la couleur bleue confère un caractère triste et froid à cette peinture, et donne une impression d'éloignement. Le mouvement contradictoire entre la distance qu'impose la couleur bleue et le corps de Charlotte qui essaye de ramper hors de la pénombre, de se rapprocher du spectateur, suscite un sentiment d'impossibilité. Son corps semble bloqué, voire aspiré dans ce tourbillon bleu.
La création de Charlotte se rapproche de l'expressionnisme allemand par l'expression, dans la couleur et le geste, de l'intériorité et de la conscience d'une artiste qui donne libre cours à ses instincts, qui agresse son support comme si elle voulait le mutiler, y laisser les stigmates de sa souffrance.
"Et toi, que vois- tu? "
Portrait Chinois
Si tu étais...
Une couleur ? Gris clair bleuâtre.
Un moment de la journée ? 17H21
Un peintre ? Je voudrais être peintre moi même.
Un tableau ? Un tag dans la rue.
Un livre ? Ulysse de James Joyce (je ne l'ai jamais lu mais je sais que je serais entre de bonnes mains)
Une citation ? « Si il danse bien il fait bien l'amour »
Un mot ? Lolita.
Galerie
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