Le cornichon, compagnon des artistes

 

   « Cornichons » est le surnom donné aux Rémois. Cornichon fait partie des insultes du capitaine Haddock, « Cornichon de zouave de tonnerre de Brest ». Bref, le cornichon est un petit fruit vert qui se croque ou qui sert d’inspiration aux artistes.

  

 

   Le cornichon, ou le condiment préféré des Français. En sandwich, en apéritif, chaque Français en croque 400 grammes par an. Son acidité et son croquant, ont fait fondre le cœur des habitants de l’Hexagone. Bref, les Français voient la vie en cornichon.

 

Racontez-moi l’histoire du « bébé concombre » ?

   C’est une plante herbacée qui appartient à la famille des cucurbitacées. Elle est récoltée avant maturité, contrairement au concombre. Le cornichon est l’enfant du concombre, ils sont de la même espèce. Le scientifique les appelle par ce doux nom « Cucumis sativus ».

« Bébé concombre », est né au pied de l’Himalaya, il y a plus de 3000 ans. Il est cultivé en Inde, puis en Egypte où il sert d’offrande aux Dieux. Après avoir conquis ces deux pays, le petit bonhomme vert a encore soif de découverte, il fait ses valises et part en Europe. Les Romains tombent sous son charme. Quelques siècles plus tard, Louis XIV a le cœur qui bat la chamade quand il le voit à sa table.

  

   Le cornichon se déguste mais il est aussi un outil de travail pour les artistes.

Giuseppe Arcimboldo, est un peintre milanais du XVIe siècle, qui appartient au courant maniériste. Maniérisme ? Ce mot renvoie au mot « manière », et manière rime avec main. En conclusion, ce sont les sentiments de l’artiste qui comptent. Le maniérisme est une réaction contre le style de la Haute Renaissance, c‘est un art de l‘émotion.

   Giuseppe Arcimboldo échappe à l’art chrétien et trouve son bonheur dans le potager, il s’amuse avec les cornichons, les noisettes, les champignons, les oranges… En 1562, le Milanais entre au service de l’empereur Ferdinand Ier à Vienne comme portraitiste. Il devient le peintre officiel de la cour des Habsbourg. De 1563 jusqu’à 1573, Arcimboldo réalise sa série des Quatre Saisons, qu’il offre à Maximilien II, fils de Ferdinand Ier. A travers cette œuvre, il représente l’évolution de l’Empereur. Le pouvoir temporel est lié à l’immuabilité des saisons. Derrière ces tableaux se cachent des messages politiques à la gloire de Maximilien II.

   Illustration avec, L’Eté, qui est une œuvre terminée en 1573 : mélange coloré de légumes et de fruits de saison. Certains disent que le nez est une courgette, d’autres pensent que c’est un cornichon. Selon moi, c’est un « bébé concombre ». L’œil est une cerise noire, la joue est une pêche, son habit est tissé de blé. Giuseppe Arcimboldo présente un visage masculin, facétieux, arrogant, bref c’est l’âge de prospérité et de paix.

 

   Changeons de siècle, direction le XXIe, et partons à Londres, à la City. Un géant vert ou plutôt un géant de verre s’est installé dans le quartier des affaires. Le 30 St Mary Axe mesure 180 mètres, 41 étages et une forme aérodynamique pour s’éclater avec le vent. Oui, c’est un gratte-ciel, il observe les Londoniens avec insolence. Qui est-ce ? Un vrai cornichon. Les citadins le surnomment « The Gherkin ».

   Construit entre 2001 et 2004, par le cabinet d’architectes de Norman Foster, le « bébé concombre » a su apporter un nouveau souffle à cette ruche, où plus de 500 000 abeilles travaillent chaque jour.

Malheureusement, il n’est pas possible d’entrer dans ce géant de verre pour y faire du tourisme. Si l’on veut y accéder, il faut se trouver un boulot au sain de cette ruche. Autre solution : attendre les portes ouvertes de l’Open House London, qui ont lieu à la fin du mois de septembre.

 

   Le cornichon en peinture, en architecture, mais aussi en musique. J’appelle le chanteur italo-français, Nino Ferrer. En 1966, il enregistre la chanson Les Cornichons à contrecœur. Ce dandy à la tête d’ange, « au flegme britannique et à l’élégance française », n’aime pas ce genre musical. Pourtant, ce style lui apporte le succès, les paroles de Ferrer sont sur toutes les lèvres. Nino est une vedette. Les Français le perçoivent comme le chanteur comique. Cependant, Agostino Ferrari est un homme profond, « Je suis le badaud sur le pont/ Je suis le noyé vagabond. » (Chanson Rondeau)

   J’achève mon article par une musique de Nino…

 

   « On est parti, samedi, dans une grosse voiture,

   Faire tous ensemble un grand pique-nique dans la nature,

   En emportant des paniers, des bouteilles, des paquets,

   Et la radio !

   Des cornichons… »

 

https://youtu.be/f6sPrpEJfEk

 

Alexandrine Rajinthan